En intégrant très tôt le numérique dans leur stratégie, les banques ont su rapidement adapter leurs services clients. Mais la révolution digitale, qui ne fait que commencer, les oblige à rester sur leur garde.

Décideurs. Où en est la digitalisation des banques ?

Franck Dahan. En moins d’une décennie, elles ont fait des progrès impressionnants. En matière de relation client, elles sont même en avance par rapport à d’autres secteurs. Désormais, les banques proposent leurs services en temps réel et à n’importe quel moment de la journée. On parle de real time banking. Pour aller plus loin dans leur digitalisation, les institutions financières doivent se concentrer sur leur « back office ». En effet, en ce qui concerne les processus internes, les initiatives de transformation sont essentiellement limitées et pilotées par la réduction des coûts. Résultat, les banques sont maintenant face à leurs contradictions. D’un côté, elles cherchent à offrir des services et accès en temps réel, mais les traitements sous-jacents s’exécutent sur plusieurs jours.

 

Quelles technologies les banques développent-elles pour y arriver ?

Si pour le moment le levier le plus important est l’automatisation, les banques réfléchissent déjà à la prochaine vague de digitalisation. Cela passe par plus de robo-advisors et de chat bots. Pour le moment, ces technologies sont plus utilisées pour faire de la segmentation de clients mais l’innovation dans ce domaine est tellement rapide que les banques pourront bientôt disposer d’un conseiller pertinent multispécialiste et disponible sur tous les supports 24/24h. Gardons à l’esprit que 100 % de la population est encline à une relation 100 % digitale.

La blockchain ne doit pas être perçue comme un projet technique mais comme un levier de service supplémentaire. La notion d’intermédiaire reste au centre du débat mais une vraie révolution sur les services et les process internes peut s’opérer.

 

« Les banques pourront bientôt disposer des conseillers multispécialistes disponibles 24/24h »

 

Certains craignent que ces progrès détruisent de nombreux emplois dans les banques. Partagez-vous cette peur ?

Non, au contraire. Pour des pays comme les nôtres, c’est même une opportunité. En gagnant en compétitivité, les banques sont moins tentées de délocaliser et gardent ainsi les emplois en France. De plus, la tâche des employés gagnent en valeur ajoutée. Ils ne sont plus limités à des tâches répétitives et montent ainsi en compétence. Ils s’occuppent de la gestion des cas particuliers et analysent les données pour trouver des modèles. Les banques ont bien sûr un travail de formation à effectuer pour accompagner au mieux leurs employés. Si l’on prend par exemple le cas de nos voisins allemands, le numérique est un vrai moyen de se prémunir des problèmes futurs de sous-capacité à produire compte tenu du vieillissement de la population (six millions d’actifs en moins d’ici 2030).

En revanche, la part grandissante du numérique se heurte à une problématique importante, celle des failles de sécurité des programmes et des menaces toujours plus importantes d’attaques. C’est sur la cybersécurité que les banques et les régulateurs doivent se concerter rapidement.

 

Comment faire en sorte que les banques coopèrent efficacement avec les start-up ?

Avant, les banques considéraient les start-up comme des concurrentes et non comme des partenaires. Aujourd’hui, les coopérations se traduisent principalement par des partenariats, souvent capitalistiques. Nous avons beaucoup de mandats dans ce sens. Mais ce n’est qu’une première pierre à l’édifice. Pour que les échanges soient fructueux, il faut réussir à dépasser deux freins. Le premier vient des différences culturelles. Le rapport au temps n’est notamment pas le même. Les solutions sont détenues par des start-up jeunes avec un temps de décision immédiat mais elles doivent être mises en place par des institutions avec des process bien établis mais lents. Malgré cela, nous sommes convaincus que ces deux mondes peuvent fonctionner ensemble. Notre rôle est de proposer un digital project management capable de faire cohabiter ces deux façons de travailler. Nous avons pour cela créé ISI, une méthodologie et un outil informatique pour que ces deux mondes puissent travailler ensemble.

Nous aidons ainsi les start-up à trouver le bon interlocuteur et à comprendre les chemins de décisions. Pour une banque, le frein vient aussi d’un manque de confiance. Comment déterminer la résilience d’une start-up dans le temps alors qu’il n’existe que très peu de données passées et que le marché à venir est encore à construire. Sur certains marchés, les prévisions de croissance peuvent aller d’un ratio d’un à dix.

 

Propos recueillis par Vincent Paes

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