Créée en 1962 par deux entrepreneurs bretons, Sill Entreprises est passé en soixante ans d’une petite entreprise familiale à un intervenant majeur de l’agroalimentaire, employant 1 200 personnes et réalisant un chiffre d’affaires de 400 millions d’euros. Jean-Jacques Pierre, directeur général délégué, revient sur ce développement exceptionnel et détaille les projets du groupe.

Décideurs. Créé en 1962 par les familles Falc’hun et Léon, le groupe Sill a connu une croissance incroyable. Quelle a été votre stratégie de développement ?

Jean-Jacques Pierre. Le premier marché du groupe a été celui des produits laitiers. Lorsque la technologie UHT a commencé à se développer, les places sur le marché du lait en briques étaient déjà prises, alors nous avons commencé à développer cette activité sur deux autres produits : les potages et les jus de fruits. Le groupe a choisi de se développer sur des marchés de niche, avec pour objectif de devenir leader sur ces segments.

 

Décideurs. Vous avez eu recours à plusieurs opérations de croissance externe pour mettre en place cette stratégie. Pourquoi avoir choisi cette voie de développement ?

J.-J. P. Nous avons cherché avec ces acquisitions à développer des gammes de produits complémentaires à nos activités historiques. À chaque fois, l’objectif était d’étoffer notre offre avec un produit spécifique : les plats cuisinés surgelés à base de produits de la mer avec le rachat de Primel en 1995 ; le beurre de baratte avec Le Gall en 1998, les yaourts Malo avec la Laiterie de Saint-Malo en 2008 ; ou encore les yaourts à base de lait de brebis avec Le Petit Basque en 2014. La diversité de nos métiers nous permet d’avoir une forte agilité par rapport à la fluctuation du cours des matières premières ou des taux de change, entre autres variables. La taille du groupe permet aussi une certaine souplesse sur le plan de la gestion. Sill emploie aujourd’hui 1 200 salariés, mais nous sommes organisés comme une fédération de PME, rassemblant des sociétés de 50 à 300 personnes. Si certaines données sont centralisées, comme les données financières, les structures restent indépendantes en matière de management.

 

L’international représente déjà plus de 25 % de notre chiffre d’affaires

 

Décideurs. Vous avez créé une holding pour chapeauter ces différentes structures en 2014. Pourquoi avoir choisi cette solution ?

J.-J. P. La création de cette holding est devenue nécessaire avec le lancement d’un projet d’envergure : la construction d’une nouvelle usine à Brest afin de développer le marché de la poudre de lait infantile. C’est un investissement très lourd que nous ne pouvions pas financer de manière classique. Nous avions besoin d’une plus grande lisibilité au niveau juridique, mais aussi de financements corporate non affectés.

 

Décideurs. Quelles ont été les solutions de financement pour lesquelles vous avez opté ?

J.-J. P. Depuis 2013, les ETI non cotées peuvent faire appel au financement obligataire. C’est intéressant, car ce financement avec un taux d’intérêt garanti sur une durée définie nous permet de rembourser l’obligation seulement à l’échéance du contrat d’émission, d’une durée de sept ans dans notre cas. Un prêt classique amortissable nous aurait forcés à devoir commencer immédiatement le remboursement, ce qui est moins intéressant compte tenu de nos contraintes temporelles : dix-huit mois pour la construction de l’usine, puis deux ou trois ans le temps que l’activité économique décolle. Nous souhaitions une maturité longue, c’est pourquoi nous avons choisi l’obligation privée. Nous avons rencontré quatorze intervenants du marché des EuroPP, essentiellement des assureurs. Les investisseurs ayant beaucoup d’appétit pour le marché agroalimentaire, nous avons pu choisir les partenaires qui nous offraient les meilleures conditions. Au total, nous avons levé 127 millions d’euros, dont 40 millions sous forme d’obligations privées non cotées.

 

Décideurs. Le marché de la poudre de lait infantile devrait aussi vous permettre d’accélérer à l’international. Quelles sont vos ambitions ?

J.-J. P. Nous sommes déjà tournés vers l’international, qui représente aujourd’hui un peu plus de 25 % de notre chiffre d’affaires. Nous avons ouvert un bureau de vente à Singapour il y a une quinzaine d’années, à travers lequel nous nous sommes développés en Asie et au Moyen-Orient. Le marché de la poudre de lait infantile va en effet nous permettre d’accélérer notre développement à l’export : la demande pour ce produit est très forte en Asie, en Chine notamment, grâce à la fin de la politique de l’enfant unique mais aussi à la hausse globale du niveau de vie. Elle est également en forte hausse dans les pays d’Afrique et au Moyen-Orient.

 

Propos recueillis par Camille Prigent

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