À l’occasion d’une session spéciale du 19 au 21 avril à New York, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté de nouvelles recommandations en matière de lutte contre la drogue.

C’est une première en vingt ans. Durant trois jours, représentants gouvernementaux, membres d’organisations non gouvernementales et personnes issues de la société civile se sont réunis pour élaborer un plan de lutte contre la drogue. Dans un document de vingt-sept pages, les nouvelles recommandations de l’organisation mettent l’accent sur la prévention et le traitement, davantage que sur la répression.

 

« Une approche de santé publique »

 

Le changement de cap est significatif pour l’ONU qui, depuis les années 1970, menait avec les États membres une guerre frontale contre la consommation de stupéfiants. Une politique qui s’est avérée peu fructueuse : le narcotrafic planétaire génère un chiffre d’affaires de 300 milliard de dollars chaque année et provoque la mort de 400 000 personnes, malgré les 1 000 milliard de dollars dépensé au niveau mondial dans la répression, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime. « Créer un monde sans drogue était un but inatteignable, dommageable pour la sécurité des hommes et le développement socio-économique », indique Daniel Wolfe, le directeur de programme international de réduction des risques de l’Open Sociéty Foundations, interrogé par Le Monde. De son côté, la directrice de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Margaret Chan, a insisté sur la nécessité « d’élargir les politiques de lutte contre la drogue (…) en adoptant une approche de santé publique ». Les nouvelles recommandations envisagent ainsi des mesures notamment en matière de prévention, de traitement, ou encore la réinsertion.

 

Des divisions internationales

 

« Comme nous n'avons pas un monde libre d'alcool, ni libre de tabac, ni libre de violence, nous n'aurons pas un monde libre de drogues », a reconnu le président colombien, qui, tout en saluant les recommandations adoptées par l’ONU, a déclaré qu’il n’était pas question de légaliser les drogues. D’autres ont à l’inverse profité de l’événement pour faire d’importantes annonces : le ministre de la Santé canadien a confirmé la légalisation de la consommation de cannabis au printemps 2017, tandis que le président du Mexique a déclaré vouloir légaliser l’usage thérapeutique de la marijuana et autoriser la consommation personnelle à petite dose. Des mesures qui ont rencontré l’hostilité de leurs homologues pakistanais, chinois, ou russes. De son côté, L’Union Européenne n’a pas réussi à obtenir la dénonciation de la peine de mort pour le trafic de stupéfiants qui continue d’être appliquée par une trentaine d’États (notamment l’Arabie saoudite, la Chine, la Malaisie, le Vietnam…), en violation du droit international. Si les intentions du texte adopté le 21 avril semblent pragmatisme, certains en espéraient davantage. Pour Guillermo Aureano, chercheur associé au sein du département science politique du Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal, l’événement est « une opportunité perdue » : « les réformateurs avancent en ordre dispersé, tandis que du côté des défenseurs du statut quo, il y a un consensus qui va de soi. »

 

 

Capucine Coquand

@CapucineCoquand

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