En Europe comme en France, on s’inquiète du manque d’encadrement des représentants d’intérêts.

La Commission européenne joue avec le feu. Le 8 février, la médiatrice européenne Emily O’Reilly lui reprochait ouvertement d’avoir manqué une occasion « de faire preuve de leadership mondial dans le domaine essentiel du tabac.» Une doléance qui n’est pas nouvelle.

 

« Insuffisante, peu fiable et peu satisfaisante »

 

En janvier 2014 l’association Corporate Europe Observatory (CEO), chargée de surveiller l’influence des lobbies dans les politiques européennes, avait déjà porté plainte contre la Commission pour non-respect de la convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la lutte antitabac. En cause : des réunions avec les avocats représentant des fabricants de tabacs, que la Commission de son côté ne considère pas comme des opérations de lobbying. Pour apaiser les tensions, celle-ci avait néanmoins décidé de publier certains comptes rendus de ces entretiens. Si l’initiative est saluée, le CEO et plus récemment la médiatrice ont dénoncé une approche « insuffisante, peu fiable et peu satisfaisante » de la Commission. Selon Emily O’Reilly, il est nécessaire de pouvoir mesurer et limiter les interactions avec l’industrie du tabac pour garantir la transparence de ces relations. Car les réseaux d’intérêt pullulent autour de Bruxelles, principalement dans l’industrie du tabac. Et pour cause, sur l’année 2014, Philip Morris International est l’entreprise qui dépense le plus d’argent dans le lobbying européen, devant les compagnies pétrolières. Sans oublier le scandale Dalligate qui révélait en 2012 les 60 millions d’euros offerts au commissaire à la santé John Dalli en échange d’un allègement de la directive tabac.

 

La France veut rattraper son retard

 

L’heure est à davantage de rigidité pour les cabinets français dit « d’affaires publiques ». Dans le cadre du récent projet de loi Sapin II, le ministre des Finances prévoit de mettre en place un « registre des lobbies ». « Fini les voyages, les avantages, les petits cadeaux, offerts par les lobbies à tel ou tel responsable public », déclare-t-il dans Le Parisien. Si les mots sont louables, le projet a de quoi laisser dubitatif. Car en 2013 déjà, le bureau de l’Assemblée nationale avait instauré une nouvelle réglementation destinée à revoir les relations entre les députés et les représentants d’intérêts. Celle-ci prévoyait notamment une inscription sur un registre pour tout représentant d’intérêt qui accepte de « jouer le jeu de la transparence en remplissant un formulaire détaillé, rendu public sur le site internet ». Ce faisant, le représentant souscrit à un « code de bonne conduite », peut-on lire sur le site de l’Assemblée nationale. Michel Sapin mise néanmoins sur son projet de loi pour rattraper « le retard en matière de lutte contre la corruption d’agents publics » de la France. Le texte présenté au Conseil des ministres dans le courant du mois de mars devra pour cela contenir des mesures neuves et réellement efficaces.

 

 

Capucine Coquand

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail