Rose Ouahba a profité de la réunion trimestrielle organisée le 12 juillet dernier par Carmignac pour exprimer le point de vue de la société de gestion sur l’actualité des marchés de taux, et notamment l’impact d’une normalisation de la politique monétaire par les banques centrales sur les différents actifs obligataires.

Sur la normalisation des politiques monétaires par les banques centrales

Pour Rose Ouahba, « le but des banques centrales est de caler la rythmique de cette normalisation sur la rythmique économique. À ce moment-là, il est possible de faire quelque chose qui soit accepté et digéré par les marchés. Aujourd’hui, cette remontée des taux d’intérêt est quand même une bonne nouvelle pour les épargnants, qui doivent faire face à des taux de rendement de leurs placements extrêmement faibles. L’équation n’est cependant pas si simple pour les banques centrales car la croissance est bonne et l’inflation en deçà de leurs objectifs. Mais d’un autre côté, elles savent que en tardant trop, elles vont être contraintes d’agir avec précipitation et de créer les prémices d’un krach obligataire. A contrario, si les banquiers centraux agissent trop tôt, ils prendront le risque de replonger les marchés mal préparés dans une situation analogue à 2013. »

 

Sur le rythme de la normalisation des politiques monétaires

 « La BCE va normalement passer son programme d’achats d’actifs à zéro en 2018. La réserve fédérale devrait, pour sa part, diminuer son action de 300 milliards en rythme constant. Tout cela va mener à une vraie réduction en termes de flux de ces achats d’actifs. Il y a toutefois des zones plus ou moins bien préparés »

La normalisation de la politique monétaire de la BCE se déroule dans un climat politique extrêmement porteur

 

Sur les vulnérabilités des marchés obligataires européens

« La bonne nouvelle en Europe est que le resserrement monétaire se déroule dans un climat politique extrêmement porteur. Les possibles avancés sur la construction européenne sont nombreuses : le Mécanisme d’assurance commun des dépôts bancaires, les projets communs d’investissement qui pourraient être financés par des bonds qui seraient émis avec des signatures communes à l’Europe, le programme de défense commun… Cet avenir politique est en train de se construire. C’est la politique qui a tenu l’Europe rassemblée. Nous accueillons donc ce renouveau avec beaucoup d’optimisme. »

 

Sur l’évolution des taux d’intérêt entre les États-Unis et l’Allemagne

« Il est clair qu’on peut se permettre un peu de resserrement, car nous avons une embellie des indicateurs économiques. Depuis 2013 les États-Unis ont anticipé cette phase de normalisation et pourtant, les taux US sont restés dans un couloir situé entre 2 % et 2,6 %. Puis l’Allemagne a un peu décroché, la BCE ayant démarré un peu plus tardivement que les USA son programme de rachat d’actifs. Aujourd’hui un petit rattrapage vis-à-vis des taux américains serait logique compte tenu de l’évolution synchrone des cycles économiques. En conséquence, il est possible d’absorber un choc de rattrapage des taux allemands vis-à-vis des taux américains. »

 

Sur la stratégie d’investissement de Carmignac en Europe

« Nous avons envie de nous réindexer à la périphérie en Europe, notamment aux taux qui nous paraissent attractifs, comme ceux de l’Italie, du Portugal ou même de la Grèce. Il y a un potentiel de diminution de l’écart de taux avec l’Allemagne. Nous sommes également convaincus que les taux vont remonter c’est pourquoi nous sommes vendeurs sur les taux cœur de l’Europe, comme en Allemagne. »

 

Sur sa stratégie d’investissement aux États-Unis

« Les marchés restent encore aujourd’hui incrédules vis-à-vis du programme de resserrement de la Fed. Ce phénomène n’est pas nouveau. Pourtant, Yellen est bien décidé à avancer, comme le prouve les deux dernières hausses des taux. Il y a pour nous matière à rattrapage, une asymétrie qu’on a envie d’imprimer dans notre stratégie de portefeuille. Pour cette raison, nous avons inséré des positions vendeuses sur les taux d’intérêts américains. »

Nous allons continuer à nous positionner sur les coco bonds et la dette émergente

 

Sur les deux secteurs sensibles à un retrait de liquidité : les emprunts privés et les emprunts émergents

« Les banques n’assureront plus le marché secondaire, puisqu’elles n’ont plus les capacités bilantielles pour le faire. Il est important de prendre en compte le fait que, si nous changeons brutalement de paradigme, on pourrait avoir une fuite vers la sortie. Sortie qui sera par nature beaucoup plus étroite. Nous avons donc pris le parti d’anticiper ce mouvement avec une diminution de nos actifs sur ce domaine-là. À l’inverse, les obligations subordonnées bancaires « coco bonds » nous paraissent toujours attractives, avec des rendement 2 % plus élevés que sur les emprunts d’entreprises. »

 

« Les marchés émergents sont aujourd’hui mieux protégés avec un coussin de rendement plus élevé que par le passé. Les pays émergents retrouvent un équilibre de leur balance courante, et la baisse des taux de change leur a permis de redresser les équilibres des prix extérieurs en favorisant les exportations et en diminuant les importations, stratégie qui les rendent moins vulnérables à un choc de taux d’intérêt. Les flux d’investissement réalisés par les non-résidents sur ces pays ont été très importants durant les toutes premières années du quantitative easing américain (2010-2012). Or ces investisseurs étaient en réalité des touristes sur cette classe d’actifs, venus capter les rendements en se finançant à bon compte sur le marché américain et en recyclant leurs dollars sur les marchés émergents. Ce phénomène de carry trade a depuis largement disparu. 

 

Sur l’importance pour les investisseurs de conserver des liquidités.

« Nous allons continuer à nous positionner sur les quelque segments pour lesquels on voit encore des écarts de rendement attractifs tels que les coco bonds et la dette émergente. Enfin, si les banques centrales viennent à faire des fautes de carre en matière de normalisation de leur politique monétaire, nous en profiterons pour les transformer en opportunité d’achat. Raison pour laquelle nous avons gardé des liquidités »

 

Propos recueillis par Aurélien Florin (@FlorinAurelien)

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